Leadership

Nous étions comme des enfants

Comme beaucoup d’entre nous, je me suis levé ce matin la tête pleine d’images et de pensées étranges. La...

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Comme beaucoup d’entre nous, je me suis levé ce matin la tête pleine d’images et de pensées étranges. La télévision repasse en boucle les événements de vendredi soir, la presse et la radio sont encore sous le choc. Sur les réseaux sociaux déferlent un mélange d’appels à l’aide, au calme, à l’union, à la guerre ou à la haine.

En pensant à tout ça, je me suis demandé quel monde nous laisserions à nos enfants. On leur souhaite le meilleur et pourtant nous fabriquons depuis plus de 50 ans ce qu’il y a de pire. Situation climatique inquiétante, instabilité géopolitique et crise économique préparent un nouveau monde, moins prometteur au premier abord.

J’avoue, je me suis souvent caché derrière le fait que je ne suis pas directement responsable.
C’est vrai après tout. Je n’achète que ce que l’on veut bien me vendre, je ne vote que pour ceux qui veulent bien se présenter et qui me paraissent les moins pires et j’appréhende du mieux que je peux l’information que les médias m’apportent.

Et pourtant, chacun de mes actes, chacun de nos actes, participe à ce que nous vivons aujourd’hui et ce que nos enfants vivrons après nous. Sommes-nous responsables ? Sont-ce seulement nos dirigeants qui doivent rendre des comptes ? Peut-on imaginer un enfant responsable ? Car c’est effectivement comme cela que je nous imagine : des enfants.

Petit retour en arrière.

Je le précise tout de suite. Je ne suis ni un historien, ni un économiste. Il se peut que tout cela ne soit qu’un ramassis d’erreurs, d’incohérences ou d’interprétations malhabiles, mais essayez de prendre en compte le fond de mon propos.

Après deux guerres mondiales traumatisantes, le monde est entré dans ce que nous appelons communément la “société de consommation” et avec elle, un confort tel que notre société n’en avait jamais connu. D’abord, il y eut l’électricité, le chauffage, l’électroménager (qui a certainement été l’un des fers de lance de ce renouveau). Ensuite vinrent le téléphone, la télévision, l’automobile, la grande distribution.

La période idyllique des trente glorieuses a marqué notre société au fer rouge. Désormais, nous sommes devenus esclaves de la croissance. Au départ, il ne s’agissait que de répondre aux besoins de la population, puis il y a eu la surproduction. Il fallait consommer, toujours plus, coûte que coûte, plus que nos revenus ne le permettaient. Quand il n’y avait plus d’argent, on s’engageait dans des crédits et l’on continuait à consommer.

Tout était alors en place pour construire ce qui allait détruire notre monde. Il y avait d’un côté notre société de consommation et de l’autre, les photos de petits africains, le ventre gonflé et crevant de faim, qui nous perçaient l’âme. Nous avons puisé, pillé tout ce que la terre pouvait nous offrir, sans nous inquiéter des conséquences. Et nous avons continué à bâtir pierre après pierre ce que nous appelons notre civilisation.

Nous étions comme des enfants

Nous étions comme des enfants à qui l’on tend des jouets, pourris de cadeaux et de mille choses plus brillantes les unes que les autres et qui ne voient pas le petit camarade à côté dont les mains restent désespérément vides. Mais la croissance était devenu une idée entêtante de notre société occidentale.

Cette croissance aura raison de millions de ménages qui s’enfonceront dans la pauvreté. Des organismes finiront par avoir droit de vie ou de mort sur des pays tout entiers qui n’entrent pas dans le moule de cette croissance exponentielle. Et jamais nous ne nous sommes demandé jusqu’où cette croissance pouvait aller. Nous étions comme des enfants à qui l’on cède tous les caprices, nous pouvions avoir le confort et une certaine liberté.

Certaines voix s’élevèrent contre cette surconsommation, des esprits chagrins pour certains, des consciences lucides pour d’autres. Nous avons privilégié l’avoir sur l’être, mais nous étions comme des enfants. Pour alimenter cette croissance, nos États avaient besoin de partenaires, quels qu’ils soient. Et des alliances ont été construites avec certains chefs d’Etats, certains pays, dont les idées nous étaient contraires. Nous avons accepté les fondamentalismes religieux s’ils étaient économiquement libéraux. Les affaires et le pétrole sont passés avant nos valeurs et ces choix engendreront des monstres des années plus tard, qui nous effraient aujourd’hui et qui répandent la mort sur leur passage.

Mais les rêves ne durent pas, ils ne sont que des rêves. Le chômage a commencé à croitre et les crises économiques à faire surface. Si l’on prend les journaux des années 70 jusqu’à aujourd’hui, on se rend compte que les sujets restent principalement les mêmes : chômage, incertitudes, peur de la guerre, crises pétrolières, gaspillages des ressources de la planète, terrorisme, politiciens qui ne tiennent pas leurs promesses et que l’on réélit pourtant, …

Et nous avons eu peur. Nous sommes devenus comme des enfants possédant tout et ayant peur de tout perdre. Des enfants apeurés et ces peurs ont été entretenues. La peur du chômage, la peur de l’immigré qui vient piquer notre boulot et notre pain, la peur de l’autre, être indéfinissable et transposable mais bien présent dans nos inconscients. Il pouvait tour-à-tour être loubard, chinois, russe, italien ou espagnol et puis plus tard, musulman, marocain ou algérien. Nous étions comme des enfants, nous ne savions pas que la haine, la peur, l’amour n’ont ni couleur, ni religion. Nous ne savions pas que nos différences ne sont rien en comparaison de ce qui nous unit réellement.

Vers un âge de raison ?

Le tableau dressé paraît bien sombre. Il l’est. C’est un fait. Les attentats du vendredi 13 novembre nous ont tous atteints. Ils ont ébranlé notre réalité. Ma génération n’a pas connu la guerre. Pas frontalement en tout cas. Nous en avons entendu parler, nous avons tous vu des images insoutenables, mais ça n’était pas chez nous, pas palpable. Mon coeur saigne pour toutes ses vies arrachées, pour leurs familles, pour tous ces “Je t’aime” qu’ils ne diront plus. Je n’oublierai pas, ni ces victimes, ni les précédentes.

Et pourtant, malgré tout cela, j’ai envie d’espérer. J’ai envie d’imaginer un peu d’espoir dans un ensemble pourtant bien morose. Si nous avons été comme des enfants, ne comprenant pas les rouages du monde qui nous entoure, ne saisissant pas les alliances et les jeux politiques et médiatiques, ne voulant pas donner de l’importance aux enjeux écologiques, je pense que nous pouvons atteindre aujourd’hui l’âge de raison et prendre nos responsabilités.

Pourquoi aujourd’hui ?

Parce que nous avons acquis de l’expérience. Demandons plus d’authenticité, de transparence à nos politiques. Au delà des clivages gauche / droite qui ne veulent plus dire grand chose aujourd’hui, réclamons un véritable rassemblement des forces, des compétences et des intelligences. Nous connaissons aussi les conséquences des idées nationalistes exacerbées : luttons fermement contre ces idées, luttons contre les médias qui jouent de nos peurs, qui portent les amalgames. Comment peut-on encore se leurrer sur tel ou tel programme politique alors que les joutes verbales des politiciens ne consistent qu’à déceler la paille dans l’oeil de l’adversaire et plus à échanger des idées ?

Parce que nous savons que nous ne pouvons pas continuer comme ça. Changeons nos modes de consommation où ils nous tueront. Nous avons un ultimatum au-dessus de nos têtes. J’apprécie de manger de la viande tous les jours, j’aime les nouvelles technologies, j’aime mon confort mais je sais aussi que tout cela gangrène notre planète. Et si nous privilégions des modes de consommation responsables, si nous pénalisions les entreprises qui ne font pas d’efforts dans ces domaines ? Nous avons plus de force que nous le pensons : nous avons notre vote et nos consommations. En les utilisant correctement, nous pourrions peut-être changer notre monde. Nous pouvons être la génération qui fera tout changer ou celle où tout se termine.

Parce que nous sommes plus proches aujourd’hui que nous ne l’avons jamais été. Le monde n’a jamais été aussi petit. Je parle régulièrement avec des américains, des canadiens, des russes, des chinois, des africains. Internet a réduit les distances, les frontières et les clivages qui pisent les populations. Daesh l’a bien compris puisqu’il s’en sert comme un marché où il puise ses prochains candidats à la mort. Si nous avions l’intelligence de parler avec d’autres personnes, d’autres cultures, d’échanger véritablement, nous prendrions conscience que nous ne sommes pas si différents.

12243329_1665116233702875_3765683160243403900_nDes amis d’Espagne, du Brésil, du Maroc, d’Amérique et de quantité d’autres pays m’ont fait part de leur tristesse face aux événements de Paris. Sur d’autres sujets, je me rends compte que notre vision du monde est très proche. Il y a des politiques qui nous séparent, il y a quelques différences culturelles, mais les gens sont les mêmes qu’ils habitent Pékin, Séoul, Sarajevo, Moscou, Marseille, Miami, Bruxelles, Téhéran, …

J’espère beaucoup de notre jeunesse et des prochaines générations. Pas qu’ils soient meilleurs que nous, comme nous n’avons pas été meilleurs que nos pères, mais parce qu’ils n’auront pas le choix, parce qu’ils ont les moyens d’être mieux renseignés et parce que je veux croire en un changement.

Si vous balayez les réseaux sociaux aujourd’hui, les publications ne reflèteront pas toujours mon discours. C’est vrai qu’ils servent tout autant à la désinformation qu’à la peur. Renversons-cela, avec intelligence et pédagogie.

Quand nous étions comme des enfants, nous n’avions pas conscience que nous n’étions qu’une seule race, une seule tribu. Il est temps de le comprendre.

Certes, mes propos pourront paraître idéalistes, empreints de naïveté peut-être. Seulement, si chacun d’entre nous n’essaie pas de changer les choses de son côté, n’attendez pas que nos puissants s’en occupent. Si l’élan ne vient pas de nous, ils n’y prêteront pas attention. Si nous n’applaudissons plus leurs beaux discours, si les salles de meeting sont vides, si les caisses de leurs partis le deviennent tout autant, il y a moyen de faire entendre notre voix.

Rassemblez autant que vous le pouvez, parlez avec votre voisin, apprenez à connaitre celui qui vous parait différent et combattez l’obscurantisme avec détermination. Je trouve dommage de mettre les drapeaux en berne durant ces jours de deuils. Je le dis avec beaucoup de respect pour les victimes et leurs familles. Il me semble que nous devrions les faire voler au vent, les dresser plus que jamais face à nos adversaires et réunir sous le pavillon tricolore tous les français, quelques soient leur religion ou leur couleur.

Parce qu’il y a des combats qui ne se remportent pas avec les poings ou les armes, mais avec l’intelligence, la plume et la culture, parce que nos choix d’aujourd’hui forment le monde de demain, parce que l’urgence ne nous offre pas le luxe de l’hésitation, luttons pour un monde meilleur à offrir à nos enfants.

Ecrit par Stéphane Torregrosa
Stéphane Torregrosa convertit vos défis marketing en opportunités avec des résultats mesurables. Il est consultant en Webmarketing, spécialisé en Inbound Marketing, conseiller en communication, blogueur et conférencier. Il vous accompagne dans la mise en place de votre stratégie Web, dans la création de contenu, pour donner de la visibilité à votre organisation. En ligne depuis 1996 et la distribution des premiers CD AOL dans les magazines informatiques, il ne s'est jamais vraiment déconnecté depuis ! Son papa lui a communiqué la passion des Comics Book, du dessin et de la photographie. Profile
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Stéphane Torregrosa dans Leadership
  ·   6 min de lecture

3 Réponses à “Nous étions comme des enfants”

  1. Merci Stéphane pour ces mots.
    Ils font écho à mes pensées, et, oui,
    les enfants finissent toujours par grandir et prendre leur envol… ensemble, déterminons le monde que nous souhaitons pour les enfants de demain!

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